Carte Blanche à Lucile Hadzihalilovic

Difficile de choisir trois films seulement parmi la longue liste d’expériences cinématographiques hallucinatoires qui me viennent à l’esprit lorsqu’on me propose cette carte blanche. Sur la dizaine suggérée, voici les pépites dont on a pu trouver les copies.

L’INCINERATEUR DE CADAVRE de Juraj Herz
C’est le plus jubilatoire des trois, et le premier qui m’est venu à l’esprit. Réalisé par Juraj Herz au moment de l’invasion soviétique en Tchécoslovaquie et immédiatement censuré, ce film est l’un des plus beaux fleurons du cinéma surréaliste Tchèque, dans la lignée des films de Svankmayer et du « Valérie au pays des merveilles » de Jaromil Jires.
Par son inventivité et ses audaces tant formelles que narratives, et son extraordinaire humour noir, ce film sur la mort est d’une jeunesse et d‘une vivacité incomparables.

LETTRES D’UN HOMME MORT de Konstantin Loupouchansky
Ce film post-apocalyptique est le plus hallucinatoire des trois. Je l’ai vu une seule fois, au cinéma, à la fin des années 80, et je n’étais pas sûre de ne pas l’avoir rêvé pendant une nuit de fièvres, après l’explosion de la centrale nucléaire de Tchernoyl. Loupouchansy l’a en effet réalisé cette année-là, à la toute fin de l’union soviétique. J’attends avec la plus grande impatience et un peu d’inquiétude de revivre sur un écran de cinéma cette vision cauchemardesque, à la fois mentale et organique, d’un futur antérieur.

TRAS EL CRISTAL de Augusti Villaronga
C’est le plus dérangeant des trois.
Sorte de variation sur Gilles de Rais, ce film est une plongée des plus perturbantes dans les abysses de l’âme humaine, sans image choc, mais avec une tension quasi insupportable. Il est pour moi – avec « Bilbao » de Bigas Luna – l’autre grand film espagnol de cette époque.